Japon : un changement de cap politique aux répercussions globales

07 septembre 2025 - 17:39

La démission annoncée du Premier ministre Shigeru Ishiba, moins d’un an après son arrivée au pouvoir, ouvre une nouvelle page de l’histoire politique japonaise. Ce départ, fruit de pressions internes au Parti libéral-démocrate (PLD) et des revers électoraux de juillet, révèle les fragilités d’un système souvent présenté comme un modèle de stabilité.

Shigeru Ishiba, figure chevronnée du PLD, n’a pas résisté aux tensions accumulées en quelques mois. Son parti, pourtant dominant depuis des décennies, a encaissé deux défaites successives lors des élections des deux chambres du Parlement. Pour les cadres du PLD, la solution passait par un renouvellement rapide de la direction afin de préserver leur autorité avant que l’opinion publique ne se détourne davantage. La rencontre, samedi soir, entre Ishiba, l’ancien Premier ministre Yoshihide Suga et le ministre de l’Agriculture Shinjiro Koizumi a accéléré une décision devenue inévitable.

Cette démission  symbolise l’essoufflement d’une formation qui, depuis l’après-guerre, a gouverné presque sans interruption. Le PLD, souvent décrit comme la colonne vertébrale de la démocratie japonaise, traverse une phase délicate où la continuité politique doit composer avec des fractures sociales et générationnelles de plus en plus visibles.

À l’international, l’impact de ce départ se fera sentir immédiatement. Dans un environnement mondial marqué par l’instabilité, le Japon joue un rôle de pivot en Asie orientale. Ses choix en matière de défense, d’énergie et de diplomatie sont scrutés autant à Washington qu’à Pékin ou à Séoul. Un changement de leadership au sommet du gouvernement japonais envoie donc un signal ambigu : le pays reste solide institutionnellement, mais son centre politique perd en assurance au moment même où les équilibres régionaux se fragilisent.

Le Japon se trouve désormais confronté à un double défi. Sur le plan interne, il doit prouver que son modèle de gouvernance conserve sa capacité d’adaptation et de consensus, même après une série de revers électoraux. Sur le plan externe, il lui revient de montrer qu’il demeure un acteur fiable pour ses partenaires stratégiques et un interlocuteur crédible dans les forums multilatéraux. La réputation du pays s’est construite sur la constance et la prévisibilité : deux qualités que le départ prématuré d’Ishiba remet en question.

Ce moment souligne également l’importance des luttes narratives dans la politique mondiale. Le Japon a longtemps cultivé l’image d’un archipel à l’équilibre institutionnel remarquable, capable d’absorber les crises économiques ou sociales sans heurts majeurs au sommet de l’État. Aujourd’hui, cette image se brouille. Le PLD doit convaincre que son renouvellement n’annonce pas une perte d’assise, mais au contraire une nouvelle énergie pour affronter les défis contemporains : vieillissement démographique, ralentissement économique, tensions régionales et recomposition des alliances.

Le choix du successeur d’Ishiba ne sera donc pas un détail. Il déterminera la manière dont Tokyo aborde ses réformes intérieures et sa place sur l’échiquier international. Pour les partenaires du Japon, cette transition doit apparaître comme une continuité maîtrisée plutôt que comme une incertitude prolongée.

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