Le président américain Donald Trump a de nouveau brandi la menace de droits de douane de 100 % sur les films étrangers projetés aux États-Unis. Derrière cette annonce spectaculaire se dessine moins une stratégie culturelle cohérente qu’un symptôme de fragilité économique et politique.
Donald Trump ne recule devant rien pour afficher son credo protectionniste. En annonçant, une fois encore, sa volonté d’imposer des tarifs douaniers massifs sur les films produits hors des États-Unis, il s’attaque à un secteur hautement symbolique : Hollywood, vitrine culturelle et puissance douce du pays. Cette sortie, publiée sur sa plateforme Truth Social, s’inscrit dans la continuité de ses déclarations de mai dernier. Mais l’absence de calendrier, de précisions sur les séries télévisées, et même de mécanisme concret interroge sur le sérieux de la mesure.
Le cinéma n’est pas une industrie comme les autres. Depuis un siècle, il structure l’imaginaire mondial, façonne les représentations et irrigue l’économie culturelle planétaire. Or, l’idée de taxer les productions étrangères à 100 % revient à dresser des murs au sein d’un espace qui vit de circulation et d’échanges. Ce projet s’apparente moins à une politique industrielle qu’à un réflexe défensif face à une industrie américaine en perte de vitesse.
En 2024, le nombre de jours de tournage à Los Angeles a atteint un plancher historique. Dans le même temps, les incitations fiscales offertes du Royaume-Uni à la Thaïlande ont continué d’attirer des productions que la Californie peine à retenir malgré le doublement de ses crédits d’impôt. L’appel de Trump sonne donc comme un constat d’échec. La concurrence internationale n’a pas seulement “volé” Hollywood, elle a su adapter ses outils aux nouvelles logiques de la production mondiale.
Reste que l’annonce suscite aussi l’embarras à l’intérieur du pays. Les syndicats et studios avaient déjà, en mai, exprimé leur scepticisme par une lettre commune, préférant des mécanismes d’incitation à la fuite en avant douanière. Même le gouverneur démocrate Gavin Newsom, adversaire politique du président, a proposé de collaborer sur un plan fédéral de 7,5 milliards de dollars en crédits fiscaux. La défense du cinéma américain devient ainsi paradoxalement un terrain d’entente bipartisan – mais sur des bases très différentes de celles prônées par Trump.
Au-delà du cinéma, le président a évoqué des mesures similaires pour le mobilier importé, sans plus de détails. Cette extension montre que la logique est globale, celle d’une Amérique en repli qui cherche à se protéger en fermant ses frontières économiques. Mais le risque est double, puisqu’elle pourrait renchérir les coûts pour le consommateur américain et en même temps provoquer des représailles commerciales susceptibles de fragiliser encore une industrie déjà en crise.
En définitive, la menace de Trump relève davantage de la rhétorique que d’une véritable politique culturelle. Le cinéma américain n’a jamais été aussi influent qu’au moment où il s’ouvrait au monde. L’idée de l’isoler derrière des barrières douanières pourrait bien transformer un secteur encore admiré en un symbole de crispation nationale. À vouloir “sauver” Hollywood par décret, Trump risque de précipiter son déclin.