Trump défie l’indépendance de la Fed et secoue la confiance mondiale

27 août 2025 - 17:38

La décision de Donald Trump d’annoncer la destitution de Lisa Cook, directrice de la Réserve fédérale, ouvre un scénario inédit dans l’histoire monétaire des États-Unis. Plus qu’un contentieux juridique, cette initiative vise à soumettre la banque centrale à la logique électorale et fragilise la confiance dans le dollar comme pilier des finances mondiales.

L’autonomie des banques centrales fait partie de ces consensus fragiles qui assurent la stabilité économique internationale. Depuis plus de soixante-dix ans, les États-Unis en ont fait une doctrine : préserver la Fed des pressions politiques afin que les décisions sur les taux d’intérêt obéissent à des critères techniques et de long terme. Ce rempart vient de subir l’assaut le plus sérieux de son histoire.

Donald Trump a annoncé cette semaine l’« exonération » de Lisa Cook, l’une des neuf directrices de l’institution, l’accusant de prétendues irrégularités hypothécaires. En l’absence de procédure judiciaire, l’argument apparaît fragile. Cook, soutenue par des juristes et des économistes, affirme que le président n’a aucune base légale pour la démettre. Tout semble indiquer une bataille devant les tribunaux, mais le signal politique est déjà lancé : la Maison Blanche cherche à discipliner une banque qui maintient son taux directeur entre 4,25 % et 4,5 %, en contradiction avec l’exigence de Trump de le réduire de trois points.

Le contexte électoral éclaire l’essence du conflit. À l’approche des élections, le président républicain mise sur un coup de fouet immédiat à la consommation et à l’investissement, quitte à accentuer les tensions inflationnistes. Pour cela, il lui faut une Fed docile, prête à sacrifier sa réputation de prudence. Ce qui est en jeu dépasse cependant la conjoncture : si Trump parvient à ses fins, la possibilité de révoquer d’autres directeurs ouvrirait la voie à la transformation de la banque centrale la plus influente du monde en simple bras exécutif de la présidence.

Les conséquences se dessinent à plusieurs niveaux. D’abord, la confiance des investisseurs internationaux, habitués à considérer la stabilité institutionnelle américaine comme la garantie ultime de la valeur du dollar. Ensuite, la crédibilité de la politique monétaire, socle des équilibres financiers à l’heure d’une grande volatilité mondiale. Il n’est pas surprenant que plusieurs analystes évoquent un « acte d’agression extraordinaire » contre l’architecture qui soutient la primauté du dollar dans le système international.

Les économies émergentes – de l’Amérique latine au Maghreb – mesurent déjà les répercussions possibles. Une Réserve fédérale soumise aux aléas politiques accroît l’incertitude sur les taux mondiaux, renchérit le coût du financement des pays en développement et accentue la volatilité des devises. Dans ces régions où la dépendance au dollar demeure structurelle, le signal envoyé par Washington prend une résonance particulière.

L’histoire récente rappelle que Trump avait déjà menacé Jerome Powell, président de la Fed, durant son premier mandat. Cela s’était limité à des déclarations tonitruantes. Aujourd’hui, l’offensive se matérialise en une tentative de révocation qui ébranle les équilibres légaux de la première puissance économique mondiale et esquisse un modèle de contrôle politique aux accents autoritaires au cœur même d’une démocratie consolidée.

Le message de fond se résume avec clarté : l’indépendance des banques centrales n’est pas un détail technique, mais un pilier de la gouvernance économique mondiale. En cherchant à subordonner la Fed, Donald Trump transforme un bras de fer domestique en une onde de choc planétaire, dont les répercussions traversent l’ensemble du système financier international.

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