Le débat autour du projet de loi sur l’enseignement supérieur, la recherche scientifique et l’innovation vient de franchir un nouveau seuil de tension. Le Parti du progrès et du socialisme (PPS) a choisi de tirer la sonnette d’alarme : selon lui, le texte actuellement sur la table du gouvernement ne se contente pas d’ignorer les attentes des enseignants-chercheurs, il fragilise surtout le rôle de l’université publique dans la société marocaine.
Pour le PPS, l’élaboration du projet s’est faite « dans la précipitation et à huis clos », comme si l’on voulait clore le dossier avant la fin du mandat gouvernemental. Une méthode jugée « expéditive », qui aurait produit un texte déséquilibré, marqué par un recul par rapport aux acquis démocratiques et pédagogiques. Sous des allures techniques se profile en réalité une bataille décisive pour la gouvernance des universités.
Le parti reproche au projet de réduire l’autonomie des universités en renforçant la mainmise d’un « conseil des gouverneurs » perçu comme une structure tutélaire, éloignée du principe d’élection démocratique des instances. L’idée même de transformer l’université en établissement soumis à une logique de marché inquiète le PPS, qui dénonce la « marchandisation » de l’enseignement supérieur et l’ouverture non régulée de nouvelles institutions privées, parfois déconnectées des besoins nationaux en matière de formation et de recherche.
La question n’est pas seulement institutionnelle. Elle touche au cœur de la souveraineté éducative : quelle place pour la recherche marocaine dans un monde dominé par les brevets étrangers ? Comment éviter que la réforme ne se traduise par une simple dépendance accrue vis-à-vis de modèles importés, au détriment de l’innovation locale ? Le communiqué du PPS insiste sur l’urgence de replacer les enseignants-chercheurs au centre de la décision, en leur garantissant une représentation effective et en rompant avec la logique de nominations descendantes.
Au-delà des critiques, le texte esquisse une vision : une université publique ouverte, ancrée dans son environnement social, capable de répondre aux défis de la formation des jeunes, mais aussi de contribuer à la souveraineté scientifique du pays. Le parti propose un véritable pacte participatif, associant syndicats, enseignants, étudiants et secteur privé, afin d’éviter que la réforme ne soit perçue comme une opération comptable ou purement administrative.
La polémique dépasse le simple cadre corporatiste. Elle soulève une interrogation de fond : quelle université pour quel Maroc ? Une université pensée comme service public, garante d’égalité et de mobilité sociale ? Ou une université soumise aux logiques de compétitivité immédiate, transformée en marché de diplômes ?
En choisissant d’alerter sur les dangers du projet, le PPS rappelle que l’avenir de l’enseignement supérieur n’est pas un dossier technique, mais un choix de société. À travers l’université, c’est la question même de la démocratie, de la souveraineté et du développement qui se joue. Reste à savoir si le gouvernement acceptera d’ouvrir un vrai dialogue avant de soumettre le texte au Parlement.
