Les juges refusent les sanctions de discipline en raison du retard dans la prise des décisions et mettent en garde contre une atteinte à leur indépendance

06 décembre 2022 - 12:34

Les déclarations du ministre de la Justice Abdellatif Ouahbi, selon lesquelles les juges seraient soumis à des sanctions disciplinaires en cas de non-respect d’un délai raisonnable pour statuer sur les dossiers qui leur sont présentés, ont provoqué la colère des juges.

La position du ministre s’est affirmée lors de sa présentation d’un projet de loi  visant à modifier et à compléter la loi réglementaire relative au Conseil supérieur du pouvoir judiciaire, qui stipule dans l’article 108 bis que le Conseil contrôlerait  la performance des juges et travaillerait à prendre des mesures appropriées pour l’améliorer et l’encadrer et ceci  afin d’accroître l’efficacité judiciaire.

Abdeslam Zouir, le secrétaire général de l’association des juges marocains, a déclaré à Alyaoum24 que tenir les juges pour responsables des retards au niveau des jugements reste une prise de position qui n’est pas fondée sur des études ou des statistiques scientifiques et objectives.

Il a estimé qu’il s’agissait d’une tentative de passer outre les principales raisons à l’origine du retard, en insistant sur le fait qu’il faut respecter les procédures prévues par la loi, et respecter les droits de la défense, et convoquer les parties du conflit conformément à la loi.

En plus, il évoque la nécessité de mener une enquête approfondie, et d’entendre personnellement les parties ou des témoins, ou la nécessité de procéder à une expertise ou à une inspection technique ou de se rendre sur place, ou de se faire assister par un interprète et le juge ne peut pas être considéré responsable du retard qui en résulte.

D’autre part, il a considéré que la question de la fixation des délais pour statuer sur les différentes affaires portées devant la justice est dans sa profondeur, un développement de la règle générale stipulée par l’article 120 de la Constitution, qui oblige les tribunaux à statuer dans les un délai raisonnable.

Abdeslam Zouir affirme également que l’article 71 de la Constitution stipule que le pouvoir législatif représenté par le Parlement est le seul qui a le droit de légiférer dans le domaine des procédures civiles et pénales, « ce qui signifie que ni le gouvernement ni le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire, ne peuvent fixer les délais précités qui relèvent de la compétence exclusive du pouvoir législatif.  »

Pour finir, le secrétaire général de l’association des juges marocains refuse de considérer que le juge est responsable de tous les cas de retard dans le jugement des affaires, et par conséquent, le condamner à une sanction disciplinaire rend l’indépendance de la magistrature et des juges réellement menacée.

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